
Pour une meilleure gestion de Paris
À Paris, l'impasse budgétaire aggrave la dette climatique
Depuis 10 ans, malgré nos alertes répétées, aucune réforme d'ampleur n'a été engagée par la Ville de Paris pour limiter l'explosion de son endettement massif. De 4 milliards d'euros en 2014, il atteindra 10 milliards en 2026.
Avec une durée de désendettement de 23 ans en 2024, bien au-delà du seuil d'alerte, et l'explosion des charges de sa dette, la Maire de Paris ne peut plus feindre d'ignorer la situation financière désastreuse dans laquelle elle a mis notre capitale. Cette trajectoire budgétaire menace aujourd'hui de devenir totalement incontrôlable avec les crises qui se succèdent (COVID-19, inflation, coûts de l'énergie, augmentation des taux d'intérêt...).
Après avoir fragilisé et usé jusqu'à la corde tous les leviers financiers dont elle dispose (emprunt, loyers capitalisés...) et après avoir successivement augmenté depuis 2014 toutes les taxes (foncière, stationnement, résidence secondaire...) tout en promettant le contraire, la Maire de Paris n'a plus d'autre choix que de rogner sur ses investissements. Le dernier en date, le gel des commandes de livres dans les bibliothèques municipales. La dette ou l'augmentation des impôts n'auront pas servi à améliorer la qualité de vie et le service rendu aux habitants.
Paris mérite une autre politique, plus ambitieuse et responsable, où chaque euro est utilement dépensé pour adapter notre ville aux enjeux capitaux : services de proximité, sécurité, propreté, accessibilité et surtout adaptation au dérèglement climatique. Sans une nouvelle stratégie, les investissements nécessaires dont Paris a cruellement besoin ne se feront pas : augmentation des espaces verts, rénovation énergétique des bâtiments, désimperméabilisation des sols, protection de la biodiversité, réduction des déchets, entretien des Bois de la capitale...
Alors que l'urgence budgétaire nationale impose de répartir l'effort de réduction de la dépense publique entre tous les acteurs, la Ville de Paris doit se saisir de cette opportunité pour se réformer structurellement, se débureaucratiser, réorganiser ses dépenses de fonctionnement et territorialiser véritablement son action en attribuant aux maires d'arrondissement davantage de moyens et de compétences pour plus d'efficacité.
Il est temps de faire entrer notre capitale dans un cycle vertueux s'articulant autour de trois priorités.
Mieux mesurer l'efficacité de l'action de la Ville
Cela passe notamment par la mise en place d'une politique de l'évaluation, comme le font d'autres collectivités comme la région Île-de-France. Évaluer davantage, c'est mettre fin aux dispositifs inefficaces ainsi qu'aux promesses non anticipées, non tenues et non soutenues financièrement. La création d'un comité d'évaluation des politiques publiques serait un premier pas que nous allons proposer.
Mieux mesurer, c'est aussi mieux planifier. L'instauration d'un programme d'investissement pour la mandature, que nous n'avons cessé de réclamer, doit aussi être une priorité. En plus de la bonne conduite des affaires de la Cité, il donnerait aux maires d'arrondissement, aux adjoints ainsi qu'aux acteurs économiques et associatifs davantage de visibilité.
L'époque qui consistait à annoncer en permanence des objectifs sans stratégie et sans budget, tout en affaiblissant la crédibilité de l'action publique, est révolue.
Engager une réduction du train de vie de l'Hôtel de Ville
La Maire de Paris en a conscience. En 2022, elle avait demandé à ses adjoints d'économiser 250 millions d'euros. Encore une annonce restée lettre morte. Une réduction des dépenses inutiles (jetons de présence, suppression du magazine papier « À Paris », multiplication des échelons hiérarchiques...) permettra notamment de dégager rapidement de nouvelles marges financières pour améliorer la vie quotidienne.
Débureaucratiser et revaloriser les agents de terrain
L'organisation de l'administration parisienne est déconnectée des attentes réelles des Parisiennes et des Parisiens. Depuis 10 ans, les dépenses de personnels augmentent de 60 millions d'euros par an. Pour 22 directions, la Ville compte aujourd'hui encore 42 directeurs et 35 sous-directeurs. À Paris, il faut moins de technostructure pour plus d'agents sur le terrain. C'est la condition pour des jardins entretenus, des crèches qui ouvrent, des rues propres, de la sécurité pour tous et partout.
Avant de procéder à de nouveaux recrutements, la Ville a l'obligation de remobiliser ses 51 000 agents, en revalorisant les bas-salaires et les carrières, en se débureaucratisant et en luttant contre le taux d'absentéisme. Ce dernier tutoie les 10% (soit deux fois plus que dans le privé) et coûte environ 250 millions d'euros par an aux contribuables.
Des solutions existent. La modulation des primes en fonction de l'absentéisme à l'instar de ce que fait Charleville-Mézières, l'application réelle des 35 heures par semaine comme la loi de 2019 l'y oblige, le passage à 3 jours de carence et des contrôles administratifs des absences longue durée, sont des mesures de bon sens qui permettraient de réduire le taux d'absentéisme et de réinvestir les services publics de première proximité.
Cette nouvelle vision, nous la devons aux Parisiennes et aux Parisiens. Pour leur assurer un service public municipal de qualité. Pour garantir les investissements dans la transformation de Paris face aux conséquences du dérèglement climatique. Enfin, pour ne plus faire peser les errements d'une gestion financière calamiteuse sur leurs propres épaules.